Régulation environnementale de l'économie

Publié le par Pierre

Contexte

Les préoccupations environnementales sont de plus en plus présentes dans le débat public. Ainsi la majorité de l'opinion publique et des politiques a pris conscience que les pollutions engendrées par l'activité humaine sont la cause des changements climatiques qui sont constatés aujourd'hui et qui pourraient s'aggraver à l'avenir si rien n'est fait.
Il faut donc agir : les politiques publiques ont ainsi créé des normes, des taxes, des marchés de droit à polluer, etc. Mais ces politiques sont encore loin de répondre aux enjeux des problèmes environnementaux et par ailleurs rende plus cher les biens produits, plus chers pour les consommateurs plus pauvres (qui dépensent une grande partie de leurs revenus dans des biens plus polluants alors que globalement ils polluent beaucoup moins que les plus riches puisque ceux-ci consomment beaucoup plus même s'ils font des efforts pour consommer "écolos"), et plus chers que des biens produits dans des pays moins à cheval sur les politiques environnementales (ce qui conduit donc les consommateurs à privilégier ces produits plus polluants mais moins chers.)
Même si le consommateur veut consommer "moins polluant", il ne sait pas comme le faire parce qu'il ne peut évaluer de lui-même l'impact environnemental des biens achetés. La multiplication des labels, les campagnes de sensibilisation sur certaines petites économies très particulières (comme couper l'eau quand on se brosse les dents, etc.) entraînent la confusion chez le consommateur. Elles ne permettent pas non plus d'engendrer des modes de consommations vertueux pour limiter les modes de production polluants.

Objectifs

L'objectif du dispositif présenté ci-après est d'aboutir à une régulation environnementale de l'environnement par la mise en place d'un système d'information qui permettra à l'acheteur de connaître par un indicateur unique l'impact écologique du bien ou service qu'il souhaite acheter.
Le principe est de mettre en place une comptabilité écologique agrégée, parallèle à la comptabilité monétaire, pour pouvoir comptabiliser les principales pollutions engendrées dans le processus de productions d'un bien ou d'un service et les agrégées au sein d'un indicateur unique.
L'objectif est aussi d'avoir un indicateur qui ne se confond pas avec le prix afin d'éviter des distorsions de concurrence (les entreprises qui ne se soumettent pas à une réglementation environnementale sont en effet avantagé dans ce cas) et un poids supplémentaire sur le pouvoir d'achat des plus pauves.

Des agences pour contrôler les atteintes à l'environnement

Il n'est possible de limiter l'activité humaine sur un environnement que si on sacralise cet environnement. Les tribus primitives qui ont pu perdurer à travers les siècles l'avaient compris et avaient établi des mécanismes sacrés afin de sensibiliser la tribu à la protection de l'environnement. Elles savaient que si les hommes portaient trop atteinte à la nature alors un jour la nature se retournerait contre eux et les anéantirait.
Les sociétés agricoles puis industrielles ont réussi à nier les limites de la nature car elles ont réussi à la dominer et à s'étendre autant qu'elles en avaient besoin pour maintenir leurs survie. Cependant la planète est finie et la population mondiale a depuis longtemps dépasser les seuils d'équilibre des écosystèmes planétaire. Nous sommes aujourd'hui entrer dans des périodes de déséquilibres (augmentation accélérée de la température globale, disparition exponentielle des espèces, etc.) et on ne constate pas encore un changement significatif de nos comportements qui permettra de limiter les pollutions globales et aider les écosystèmes à retrouver une position d'équilibre.
Néanmoins la recherche sur l'environnement a beaucoup avancé et peut à peu près évaluer ce que nous polluons et les seuils d'équilibre pour les écosystèmes. Même si les scientifiques ne peuvent pas affirmer qu'en réduisant de temps les pollutions de tant, on évitera un risque écologique majeur, il est néanmoins possible de se définir des seuils collectivement. Ainsi lors de colloques internationaux qui ont réunis ces scientifiques, les représentants des gouvernements mondiaux et la société civile, il a été possible de définir des niveaux souhaitable d'émission de gaz à effet de serre en 2050. Néanmoins personne ne sait aujourd'hui comment on pourra atteindre de tel seuil lorsqu'on constate l'évolution actuelle des émissions...
Mais si des seuils peuvent être définis collectivement, on peut chercher à les "sacraliser". Il est proposer ici d'instituer des agences environnementales responsables du suivi d'une pollution, par exemple des gaz à effet de serre à l'échelle globale, des pollutions de l'eau à l'échelle d'un bassin hydrologique, etc. de leur donner des missions qui viseront à permettre une régulation de l'économie pour l'orienter vers les seuils de pollutions définis collectivement. Il n'est cependant question de faire de ces agences des organismes de taxation des pollution mais plutôt des moyens de diffuser une information sur les pollutions émises sans influer directement sur les flux monétaires.

Mise en oeuvre d'une comptabilité environnementale dans les entreprises

La plupart des entreprises (et des organisations formelles en générale) disposent d'une comptabilité monétaire : elle enregistrent leurs charges (produit des quantités achetées par les coûts unitaires) d'un côté et leurs recettes (produit des quantités vendues par le prix de vente) de l'autre. En règle générale, le prix de vente est fixé par l'entreprise pour équilibrer ses charges par ses recettes et dégager un bénéfice (sauf si cette entreprise est contrainte par un objectif d'équilibre comptable.)
Certaines entreprises mettent aussi en oeuvre des comptabilités environnementales, c'est-à-dire essentiellement qu'elle mesure chacune des pollutions dues au processus de production : quantité de gaz polluants émis, pollutions rejetées dans l'eau, etc. Cependant, cette comptabilité ne donne pas d'information facile d'usage sur l'impact environnemental des quantités vendues pour la raison puisque les différentes mesures de pollutions enregistrées ne sont pas agrégeables. Il serait difficile pour un consommateur de s'y retrouver entre les émissions de gaz à effet de serre, les émissions de gaz locaux, les pollutions sur les nappes phréatiques, les rejets de déchets et leur recyclages, les pollutions des sols, etc.

Pour pouvoir décider, le consommateur ne peut pas juger sur des dizaines d'indicateurs. 2 ou 3 constituent le nombre maximum. Le prix en constitue un très important.
La science économique a de multiples propositions pour permettre une prise en compte des impacts environnementaux (les externalités) dans le prix monétaire. Mais l'objectif est ici de séparer complètement la constitution du prix et celle de l'indicateur environnemental.
L'idée serait donc de définir une mesure écologique qui permette de réaliser un tableau comptable où chaque pollution peut être inscrite comme quantité de pollution émise multipliées par la mesure écologique unitaire. De même un bien ou un service acheté devrait pouvoir avoir une mesure écologique unitaire qui pourraient être inscrite comme charge écologique par l'entreprise. En recette elle pourrait alors fixer le prix écologique des produits vendus afin d'équilibrer les charges écologiques par les recettes écologiques.
Dans ce schéma, les entreprises en amont des pollutions (celles qui brûlent une énergie thermique, qui rejette des polluants dans l'eau, etc.) doivent obtenir une mesure écologique de leur pollutions directes. Pour cela, elles pourraient obtenir des droits à polluer aux agences environnementales pré-citées. La mesure écologique étant fixée par ces organismes en fonction des objectifs de régulation qu'ils se sont définis.
A partir de ces mesures, il est donc possible d'imaginer la mise en place d'une comptabilité environnementale agrégée à l'intérieure d'une filière industrielle qui permettra en bout de chaîne d'afficher une mesure écologique du bien produit (équivalent à une agrégation des impacts mesurés par analyse du cycle de vie du produit).

Pourquoi un indicateur environnemental séparé du prix monétaire

La nouveauté du mécanisme décrit ici par rapport aux mécanismes issues des théories économiques classiques (qui ont notamment conduit au protocole de Kyoto avec la mise en place d'un marché de droit à polluer). La science économique propose des systèmes de réallocation qui permette de prendre en compte les externalités environnementales dans les échanges et donc d'amener soit le pollueur soit le pollué (suivant les mécanismes) à payer pour limiter la pollution.
Ces mécanismes ont plusieurs inconvénients d'un point de vue politique et social (voir en introduction) et ne s'applique pas forcément pas à des enjeux comme le changement climatique parce que la théorie économique se fonde sur des "dispositions à payer" et il est difficile d'estimer une disposition à payer des consommateurs pour éviter des pollutions qui auront un impact dans 50 ans ou plus...

Un indicateur écologique séparé du prix monétaire devrait avoir plusieurs vertus :
- donner une information plus sûre pour le consommateur qui pourra distinguer la valeur monétaire d'un produit (qui peut être associée à une valeur ajoutée plus élevée en partie pour rémunérer des salaires plus élevés) et l'impact environnemental (qui n'est pratiquement pas corrélée à la valeur du travail fourni dans la production puisqu'on ne juge pas que l'effort de travail humain soit polluant) ; - ce nouvel indicateur permettra d'engager une politique de décroissance (de la pollution environnementale) sans qu'elle faire de la "décroissance économique", qui serait sans doute source de nombreux mal sociaux (chômage, réduction des recettes publiques, etc.) ; - si cet indicateur est performant il sera possible d'obliger les consommateurs (au moins dans les pays riches) à comptabiliser leur impact environnemental pour l'ensemble de la consommation (par une carte à puce par exemple) et ensuite de les inciter à réduire leur impact total, voir les contraindre à le réduire en dessous d'un seuil égal pour tous ; - par contre, les consommateurs les plus pauvres n'ayant pas un impact environnemental très important (leur consommations étant plus faibles) ils devraient se situer en dessous du seuil moyen, et ne devraient donc pas être contraints.

Autres questions à développer

De nombreuses questions doivent être traitées pour justifier l'intérêt d'un tel mécanisme.
Il sera ainsi proposé de développer à la suite de cet article les points suivants :
Comment une organisation environnementale peut-elle définir cette mesure écologique ?
Comment une entreprise va définir le "prix" environnemental de ses produits ?
Si une entreprise veut mette en place cette comptabilité mais que l'un de ses sous-traitants ou fournisseurs ne le fait pas, comment pourra-t-elle obtenir une mesure écologique des biens et services achetés ?
Une comptabilité écologique est-elle possible et acceptable pour toute organisation, notamment les petites entreprises, les petits commerces, etc. ?
Comment se traduit la comptabilité écologique pour une organisation (notamment pour une collectivité publique) lorsque une partie de ses recettes provient de taxes et d'impôts ?
Comment le consommateur peut-il utiliser cette information environnementale ?
Sera-t-il possible alors de contraindre le consommateur pour réduire ses consommations polluantes ?
Toutes questions, critiques (constructive bien sûr) ou suggestions à ce stade sont les bienvenues.

Liens

Un site complet pour tout savoir sur le chanement climatique : Manicore.com

Divers articles sur les outils à disposition des entreprises pour prendre en compte l'environnement : Dossier de la Jaune et la Rouge de septembre 2003

N'hésitez pas à proposer des références